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Les tiroirs de l'inconnu

Dans cette page Machines et Moteurs vous propose de découvrir (ou de redécouvrir), une marque ou un modèle inconnu, peu connu ou disparu des mémoires.

La véritable histoire de la Triumph Bonneville.

La véritable histoire de la Triumph Bonneville.

 Beaucoup de personnes me demande pourquoi j’arbore fièrement le drapeau du Texas sur les circuits ou dans les salons.
Tout simplement parce que l’histoire de la Triumph Bonneville commence aux USA, plus précisément dans l’état du Texas et dans la ville de Fort Worth a coté de Dallas. C’est dans le magasin de moto de Pete Dalio où tout a commencer. Le magasin moto de Dalio qui deviendra plus tard Big D Cycle ,  repris par son mécanicien et ami Jack Wilson. Le magasin existe toujours et est la propriété de Keith Martin. Pete Dalio, son mécanicien Jack Wilson, James Harold Mangham surnommé ‘’Stormy’’ et le colonel Kohne se retrouvaient toutes les semaines à l'atelier afin de faire un poker. Le colonel, d’origine allemande, était évidemment fan de machines germaniques. Au cours d’une de ces fameuses parties, le ton monte entre le colonel et les trois autres compères. La moto la plus rapide du monde est allemande et non anglaise. C’est NSU qui détient le record de vitesse absolu avec un vertical twin de 500 cm3 muni d’un compresseur. La vitesse maximum fut atteinte sur l’autoroute reliant les villes de Munich à Ingolstadt, cette vitesse est de 173 mph soit 278,35 km/h. Le précédent record était tenu par une BMW.
James Harold Mangham est né en 1907, depuis sa tendre enfance Mangham est attiré par les motos et tout spécialement par les machines de courses, il court régulièrement, et c’est grâce aux compétitions que son surnom ‘’Stormy’’ (orage) lui sera donné. Mais son père voit cela d’un très mauvais oeil, et il lui fait alors une proposition : Si il arrête la moto il lui offrira un avion... La proposition fait mouche et Stormy se retrouve propriétaire d’un biplan Curtiss JN4 de la première guerre Mondiale. Après huit heures de cours de pilotage, Stormy est lancé. Il part d'abord à la chasse des distilleries d’alcool clandestines, puis il participent a des foires, et finira par prendre du service dans l’aéropostale américaine. La moto lui manque et c’est pour cela qu’il se rend régulièrement chez son ami Pete Dalio.
Fort de son expérience aéronautique il cogite un véhicule pour établir le nouveau record du monde.
Son mécanicien avion, Frank Davis lui fabrique un châssis réalisé en tube ‘’aéro’’ de 12 mm de diamètre et de 0,9 mm d’épaisseur. Stormy avait dessiné un cigare profilé où le pilote était allongé a l’avant du ‘’Streamliner’’. Une coque en polyester est fabriquée et Stormy se rend compte que la position du pilote n’est pas la bonne. Le pilote sera finalement assis. L’empattement est de 2,84 m. La coque fait 4,77 m de long, 68,6 cm de haut et seulement 56 cm dans la partie la plus large. La garde au sol est de 5 cm. Les roues sont des Triumph de 19 pouces de diamètre recouvertes de flasques en aluminium pour l’aérodynamique. La roue avant n’as pas de frein, seul l’arrière en possède un. Le moteur est la boite de vitesse provienne d’une 6T Thunderbird. Une partie du cadre de la moto est soudé à l’arrière du châssis tubulaire pour porter le moteur et la boite. Afin d'obtenir une machine la plus basse possible, la colonne de direction est très courte et ne possède qu’un seul roulement de grand diamètre. Pas de suspensions, l’ensemble est donc rigide. Le Streamliner pèse seulement 145 kg. Dalio et Wilson ne pensent pas que le raccord puisse être battu car le moteur reste d’origine. Des vieux pneus de camion ont été découpés pour tapisser la cloison pare feu entre le pilote et le moteur et un extincteur fut posé dans le poste de pilotage et dirigé vers le moteur. Un parachute de 25 cm sera installé à l’arrière. La coque n’a reçu qu’une couche d’apprêt et en Septembre 1954, Stormy part pour le lac salé de Bonneville. Lors du Briefing, Stormy explique que son véhicule va certainement dépasser les 320 Km et, est donc muni d’un parachute pour pouvoir l’arrêter. Toute l’assemblée a rit, mais le lendemain tout les participant installèrent un parachute.... Stormy fait quelques Runs, puis le carburateur d’occasion rendit l'âme. Stormy a été officiellement chronométré a 165 mph (265,48 km/h) sur un mile, il en a déduit qu’il avait du atteindre 190 mph a la fin du Run (305,71 km/h). Le dernier Run officiel a été chronométré à 144 mph (231,70 km/h ce qui est très correcte pour un moteur de série de 650cm3 et fonctionnant à l’essence du commerce.... La nouvelle arrive au Texas avant le retour de Stormy. Il tient là une super machine, après tout Stormy a atteint plus de 210 km/h avec un carburateur qui n’était pas au mieux de sa forme...Dalio et son mécanicien Jack Wilson sont décidés a participer au projet prometteur de Stormy. Jack Wilson décide de préparer un moteur de 6T de 1950. L’alésage et la course restent de série (71X82mm), la culasse est modifiée et deux conduits d’admission sont soudés pour permettre le montage de deux carburateur Amal GP. Les soupapes d’admission sont remplacées par des soupapes de Harley model K (46.10 mm). L’arbre à cames et les poussoirs sont ceux du kit Racing de l’usine. Le rapport volumétrique est de 11 :1, du nitrométhane est ajouté à l’essence. Le rapport de transmission final est de 2,8 :1. Wilson dit que son moteur est plus puissant que 80 véritables chevaux Texans. Deux parachute de 6 et 137 cm sont utilisés. La coque est enfin peinte, rouge et argent, le streamliner est baptisé la flèche du diable (Devil’s Arrow). La machine est essayée sur une portion d’autoroute près de Fort Worth. Stormy pense qu’il faut demander à un ‘’vrai’ ‘pilote de conduire le cigare.
Johnny Allen avait été victime d’un accident en compétition, il avait failli perdre sa jambe. Etant en convalescence, il trainait souvent au magasin de Dalio. Quand Stormy lui demanda si il voulait piloter le cigare, Johnny lui répondit : « Et comment »... Ce qui ne gâche rien, Johnny et fin et sec... Le gabarit idéal pour piloter le streamliner. Johnny Allen avait commencé a piloter pour Dalio en 1949, il remportera le titre de champion du Texas en short-Track. La même année Vincent avec une Black Lightning en Nouvelle Zélande est chronométré a 163,06 mph (262,37 km/h) et devient la machine la plus rapide du monde. Johnny va battre ce record en en Aout suivant, plusieurs runs seront chronométré a 138 mph, 156 mph puis 173 mph (278,4 km/h). Le dernier sera le bon, 191 mph (307,32 km/h).
Pour continuer, il leur faut un sponsor et un peu plus d’argent. Johnson Motors, importateur Triumph pour la cote ouest dirigé par Bill Johnson les rejoints et finance l’équipe. La publicité sera mondial, l’affaire lui semble bonne.  L’équipe sera sur la piste 3 semaines plus tard, le cigare est alors équipé d ‘un petit saute vent et de nouveau pneus Dunlop avec une carcasse spécial résistante aux vitesses élevés.
Johnny s’élance, les premiers runs ne serons pas les bons, le moteur cale. Johnny recommence cette fois tout tourne rond. Il couvre le Km a 193,88 mph (311,95 km/h) et le mile a 192,719 mph (310,08 km/h). Pour le run de retour, le moteur est poussé a 7000 tr/mn, il sera chronométré a la moyenne de 193,72 mph (311,70 km/h).Le record sera homologué par l’AMA ; American Motorcyclists Association. Par contre la FIM refusera d’homologuer ce record considérant qu’il n’y avait pas de chronométreur officiel affilé par la FIM...
L’équipe et Strormy vont travaillés sur la moto pour revenir en 1956 pour cette fois obtenir un record homologué. La coque est modifié avec un repose tête profilé et un déflecteur est installé a l’avant pour éviter les projections de sel sur la roue avant. Wilson s’occupe du moteur, la culasse reste en fonte malgré la proposition de l’usine Triumph de fournir une culasse en aluminium. Les soupapes d’admissions sont agrandies  de 6,00 mm. Les soupapes d’échappement restent celles de série. Les ressorts de soupapes sont des S&W, les arbres à cames proviennent du catalogue Triumph racing (réf Q), le rapport volumétrique est rabaissé à 8,5 :1. Le carburant est un mélange de 20% de Nitrométhane, 75 % de Méthanol et 5% de Benzol. La magnéto est une Lucas racing en remplacement de la BTH. La boite a des rapports plus rapprochés et la première est plus longue. Le pignon moteur a 26 dents au lieu de 24 et le pignon de sortie de boite a 32 dents pour donner un rapport de 2,33 :1. La coque est repeinte aux couleurs du Texas, en bleu et blanc avec la Lone Star sur le nez peinte en rouge. Le streamliner porte son numéro 18 à l’arrière de la coque.
Cette année NSU revient avec une 500 cm3 suralimenté. Elle est peinte en rouge et se nomme Delphin III. Le samedi 4 Aout, Wilhem Hertz entre dans le livre des records avec une moyenne de 211,40 mph (340,14 km/h). Johnson Motors avait réservé la piste de Salt Flats du 4 au 6 Septembre. Le 5 Johnny Allen s’élance, 6500 tr/mn en première  il atteint, au même régime en seconde vitesse les 100 mph, puis passe la troisième pour atteindre presque 200 mph, la quatrième est passée, mais des vibrations se font ressentir. Johnny rentre et l’équipe découvre une roue avant déséquilibrée. Le 6 Septembre ils repartent.
Johnny passe les rapports dés les 7000 tr/mn atteints. La Thunderbird est à 7000 tr/mn quand il atteint la deuxième balise à 216,44 mph (348,25 km/h). Les chaines de transmissions sont changés pour le run de retour. Il établi une moyenne de 214,17 mph (344,60 km/h) , le record est battu.
La FIM homologue la performance, puis revient sur sa décision quelques mois plus tard. Mais c’est trop tard. La presse américaine et anglaise se sont emparée du record. Il fait la une de l'actualité. ''La moto la plus rapide du monde'' , les pubs s’enchainent, les pneus Dunlop, les carburateurs Amal, les bougies Lodge, les chaines Reynolds, Lucas, Triumph et Johnson Motor’s.
Quand l’usine Triumph dévoile son nouveau model au salon d’Earl’s Court en 1958, ils la baptisent, en hommage a Johnny Allen et aux Texans la moto la plus rapide du monde, la Bonneville vient de naitre...

Après le terrible incendie du Musé de Birmingham en 2016 où la moto de Johnny Allen était exposée, elle sera st totalement détruite, c’est l’Atelier de Keith Martin Big D cycle à Fort Worth qui l’a entièrement restauré... Mais ceci est une autre histoire.

D’après Philipp Tooth

Harry Moteur.




1955, Devil's Arrow des records. De gauche à droite. Stormy, Johnny Allen et Jack Wilson.

L'équipe au grand complet pose devant Devil's Arrow

La publicité des bougies Lodge lors du record de 1956.