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La Norton type F

Durant l’hiver 1955- 1956 Norton et AJS annonçaient leur retrait officiel de la compétition. Ces 2 marques ne développeraient donc plus de machines d’usines, mais  allaient se concentrer sur les machines compétition-clients vendues aux pilotes privés.
La nouvelle fit l’effet d’une bombe qui modifiait radicalement la tournure des courses internationales. L’effet fut le même tant auprès du public qu’à l’usine Norton de Bracebridge Street.
Il est bon de rappeler que la marque Norton fusionna avec le groupe AMC (Associated Motor Cycle) en 1953.
Norton n’était plus décisionnaire dans ses choix et même si c’était la seule marque du groupe qui restait bénéficiaire, la décision de stopper le département course ne lui appartenait plus. Cette décision resta valable pour l’ensemble du groupe ;
Il est vrai que les usines Italiennes, Guzzi en 350 et Gilera en 500, font alors de gros efforts et le pauvre moteur Manx commence à avouer ses limites. Même en side car le moteur BMW a détrôné le Manx
Au moment de cette décision fatale, radicalement nouvelle au sein de l’équipe Norton, un nouveau moteur Unit  (moteur et boite assemblés dans un même carter) avait déjà été testé au banc d’essai et un nouveau cadre avait été dessiné. En bref un nouveau prototype était prêt à prendre la piste.
Plutôt dépité, le grand designer, chef d’équipe et tacticien, Joe Craig retranché dans son bureau d’étude, ne pourrait donc jamais voir cette nouvelle machine sur la piste. Joe prit sa retraite fin 1955 et déménageât en Hollande ou il se tua dans un tragique accident de voiture en 1957.
En 1959, la direction de l’usine Norton accepte que la revue Motor-Cycling écrive une série d’article intitulés ‘’Built for Speed’’ et dévoile ainsi ses derniers prototypes.
Le mécanicien de course Jack Workman assisté du jeune ingénieur de développement Doug Hele, astiquent, peignent et polissent les machines oubliées afin de les rendre le plus présentables possible.


 C’est ainsi que le type F se voit affublé du réservoir d’essence de l’AJS ‘’Porcupine’’ légèrement retouché. Le type F n’ayant jamais été terminé aucun réservoir d’essence ne lui avait été construit. Doug et Jack lui installèrent ce réservoir AJS qui s’accommodait bien de l’effet ‘’Streamliner’’ de cette machine….Le moteur est sans aucun doute la partie la plus intéressante d’une machine de course, et celui-ci ne fait pas exception. 

Ce modèle Unit à été appelé par Norton type F, F comme Flat car le cylindre est situé en position couché. C’est en fait un moteur de Manx remanié et dessiné en position horizontale avec une boite de vitesse incorporé (Unit).La boîte à cames et le train de pignons de distribution sont absolument les mêmes que les dernières machines de l’année, seule la culasse est très différente. Les ailettes de refroidissement sont beaucoup plus nombreuses que d’ordinaire et sont en position horizontales pour être dans le même sens que le flux d’air. Comme on peu le voir l’ailettage est particulièrement généreux autour de la sortie d’échappement dont la particularité est d’être fixé par une bride à 4 vis et non par un système de collerette visée comme sur les autres Manx. La culasse photographiée est celle du moteur 350, la 500 étant installée sur le moteur il n’est pas possible de voir les différences internes, il semble qu’à part le volume des chambres elles soient très similaires. L’axe horizontal du cylindre, qui est en dessous de l’axe du vilebrequin au point mort haut, montre que le moteur est légèrement désaxé.
L’angle des soupapes est un standard des moteurs Norton (64°), la soupape d’admission est de 2 pouces de diamètre (50,80 mm) c’est la classique KE965, la soupape d’échappement creuse est  refroidie au sodium. Son diamètre est de 1,718 pouce (43,64mm). Le diamètre des queues de soupapes sont respectivement 5/16’’ et 0,48’’ (7,94 mm pour l’admission et  12,19 mm pour l’échappement).


L’utilisation d’une soupape d’échappement remplie de Sodium est alors une pratique courante en compétition automobile, ce procédé favorise le refroidissement.
Le vilebrequin est composé de 2 pièces, le maneton fait partie de la soie gauche du vilebrequin (comme plus tard les 450 Honda). Ce type de vilebrequin assemblé est donc plus léger et beaucoup plus rigide, ce qui prévoit un régime moteur beaucoup plus rapide que les anciennes versions. Le maneton est beaucoup plus gros que sur le standard des moteurs Manx, il comporte 15 rouleaux de 5/16’’ par 5/8’’ (7,94 mm de diamètre par 15,875 mm de long).
Le vilebrequin est supporté coté primaire par un roulement à double rangée de rouleaux et coté distribution par un roulement à double rangée à bille.  Un soin particulièrement important à été donné a l’ajustement des pignons coniques de distribution éliminant l’utilisation de cales de réglages.
Le moteur fut testé au banc d’essai avec de l’essence à 95 octane à travers un carburateur Amal Grand-Prix de 1’7/16 (36,51 mm).
Le corps du carburateur est accouplé à la culasse par une pipe en caoutchouc de 1,406 pouce (35,72 mm) de diamètre. Un adaptateur est fixé à l’avant du carburateur pour que le gicleur principal se trouve bien en position vertical alors que le corps est lui horizontal. La cuve, non visible sur les photos, était montée à l’avant des 2 tubes du cadre.
Le petit tuyau sur le corps du carburateur sert à l’alimentation en air du gicleur de ralenti, gicleur nouveau sur un Amal Grand-Prix. Un nouveau prototype d’allumage batterie-bobine Lucas à été développé spécialement pour cette machine afin de fournir un allumage parfait à tous les régimes.
La bobine d’allumage à été particulièrement soignée. Le plateau des rupteurs est positionné dans un carter fixé à la base de l’arbre vertical de distribution. L’utilisation d’une avance manuelle est un fait nouveau sur une machine de compétition.


La pompe à huile est différente des précédentes (toujours la même depuis la Norton Inter), la boite à came est vidangée par la pompe de retour, un tuyau part de la partie inférieure du boitier des cames vers le corps de la pompe, à huile.
Un petit radiateur à ailettes est fixé sur le circuit de retour.
Des pignons à taille droite entrainent la boite  à 5 vitesses. Ils sont enfermés dans un carter situé derrière le volant moteur, la suppression de la chaine primaire peut être considérée comme une nouveauté révolutionnaire.
L’embrayage est à sec et à l’air libre.La boite de vitesse comporte 3 arbres de boite. Un arbre principal et 2 arbres secondaires. Le pignon de sortie de boite est placé du coté droit, il peut être changé rapidement, ce qui est une vraie nouveauté sur un moteur d’Anglaise, car d’ordinaire toujours placé derrière l’embrayage.
Le cadre de cette machine est fait en tubes Reynolds 531. La forme est un complet revirement par rapport au désormais classique Featherbed.


 La poutre principale de 4,5 pouces de diamètre (114,30 mm) fait également office de réservoir d’huile. A l’avant est brasée la colonne de direction qui est placée au travers de la poutre principale. A l’arrière sont soudés des tôles pour former le fond du réservoir d’huile, elles soutiennent également le moteur par des platines et entretoises en Dural.
A la moitié de la poutre principale est soudé un treillis de  tubes de 7/8 de pouce (22,22 mm) formant un triangle. Les amortisseurs sont fixés à l’extrémité de ce treillis lui même renforcé par une série de goussets soudés. 2 tubes démontables partent de la colonne de direction pour soutenir l’avant du moteur. Le bras oscillant est articulé sur 2 larges platines en aluminium fixées sur les supports moteurs arrière. Ces platines soutiennent également les commandes reculées. 


 Le moteur couché a allongé l’empattement de 1,5 pouce (38,10 mm) par rapport à une Manx classique, ce qui rend la machine moins maniable, mais améliore la tenue de route en grande courbe.
La fourche est une traditionnelle Roadholder,  un modèle à balancier était prévu dans le programme de développement et de mise au point.
Ce prototype de fourche à balancier avait été testé sur les modèles de 1954.
Le frein avant est une double came de 8 pouces de diamètre (203,20 mm). C’est le même modèle qui équipait les machines d’usine de 1954.
Au banc d’essai le moteur confirme qu’il est bien né, la puissance et le couple sont bien là… 

Malheureusement l’équipe du service course n’a jamais pu développer cette super machine, ni même la faire tourner sur un circuit, nous ne saurons jamais si elle aurait pu être meilleure que ses grandes sœurs et donner du fil à retordre aux écuries Italiennes et Allemande…


JOHN GRIFFITH // HARRY MOTEUR

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